Course à trois au cœur de Québec

Les choses changent vite en politique québécoise. L’élection partielle qui pointe à l’horizon dans la circonscription de Jean-Talon l’illustre parfaitement, et son résultat en dira long sur l’état de chaque parti représenté à l’Assemblée nationale.

À la dernière élection générale d’octobre 2022, la candidate de la Coalition avenir Québec (CAQ) Joëlle Boutin a remporté le scrutin par près de 3000 votes. Ce faisant, le parti du premier ministre François Legault a mis fin au règne ininterrompu des libéraux depuis la création de la circonscription, il y a plus de 50 ans.

Moins d’un an plus tard, M. Legault doit remettre le siège en jeu après la démission surprise de Mme Boutin, au cours de l’été.

Si l’on se fie aux sondages nationaux, on pourrait prédire une victoire facile pour la CAQ. Or, les analyses les plus récentes indiquent que l’issue de l’élection est incertaine. Encore plus surprenant : ni la CAQ, ni le Parti libéral (PLQ) ne sont en tête des intentions de vote. C’est plutôt le Parti québécois (PQ) qui mène la course, suivi de près par Québec solidaire (QS).

Comment en sommes-nous arrivés là? Voici un tour d’horizon pour mieux comprendre les forces politiques en présence dans la circonscription de Jean-Talon, qui ira aux urnes d’ici la fin du mois de janvier 2024.

La CAQ doit une grande partie de son succès à la région de Québec, mais le parti a perdu plusieurs points dans la région après avoir abandonné un projet routier majeur, le ‘’troisième lien’’ entre Québec et sa Rive-Sud. Les derniers sondages indiquent que la CAQ a perdu 7 points dans la région par rapport à son score à l’élection générale de 2022. Beaucoup de travail attend celui ou celle qui se présentera sous la bannière caquiste, assuré néanmoins de recevoir l’aide de la machine du parti dans la région.

Québec solidaire est à ce jour le seul parti à avoir désigné son candidat pour l’élection partielle dans Jean-Talon. À l’occasion d’une assemblée d’investiture tenue début août, ses membres ont choisi Olivier Bolduc, même si les hautes instances du parti avaient appuyé sa rivale, la comptable et professeure d’université Christine Gilbert. La formation politique, qui compte quatre femmes et huit hommes au sein de son caucus, avait reçu le mandat de ses membres de prendre les moyens d’atteindre la parité hommes-femmes. Or, les membres de la formation indépendantiste de gauche n’ont pas été convaincus d’appuyer la nomination d’une candidate qui aurait mis en vitrine son expertise en matière d’économie. Malgré cette note dissonante de début de course, QS fait bonne figure dans les sondages, alors qu’il y a quelques années encore, le parti de gauche récoltait entre 5 et 10 % des votes élection après élection. 

Fort du vent de sympathie à l’égard de son chef Paul St-Pierre-Plamondon, le Parti québécois vit une véritable résurrection dans la région de Québec après des années difficiles. Les plus récents sondages le placent en tête des intentions de vote dans la Capitale québécoise depuis l’abandon du troisième lien. Son défi sera d’obtenir de bons résultats, à défaut d’une victoire, pour se positionner favorablement en vue des élections générales de 2026. La formation indépendantiste s’est très vite mobilisée sur les réseaux sociaux après l’annonce de la démission de Mme Boutin avec le slogan « Battre la CAQ à Québec ». Comme pour confirmer ses ambitions électorales, elle tiendra son caucus présessionnel dans la circonscription de Jean-Talon à la fin août. L’annonce de la candidature pourrait avoir lieu à ce moment, alors qu’au moins deux candidats ont manifesté leur intérêt. 

Après avoir régné sans partage sur Jean-Talon depuis 1966, le Parti libéral se trouve maintenant en quatrième place dans les intentions de vote. Ses appuis au sein de l’électorat francophone ont fondu à 4 % à la grandeur du Québec. Le parti n’a pas de chef permanent depuis la démission de Dominique Anglade au début de l’année. Aucun prétendant n’a manifesté d’intérêt pour lui succéder et le parti n’a toujours pas dévoilé la date et les règles de la course à la direction. Dans ce contexte, et malgré les meilleurs efforts du chef par intérim Marc Tanguay, il semble difficile pour le PLQ de recruter un candidat d’envergure dans Jean-Talon, plus difficile encore d’espérer remporter la partielle.

La CAQ réussira-t-elle à conserver son siège? Le PQ peut-il confirmer sa montée dans les sondages? QS peut-il surmonter ses désaccords internes? Le PLQ peut-il surmonter son infortune sur un terrain favorable? Nos clients peuvent compter sur PAA Conseils pour les tenir au courant de tous les développements en politique québécoise cet automne. Après tout, les choses changent vite.