Si la crise de la COVID-19 a contraint les gouvernements, les entreprises et la société civile à se concentrer sur les interventions d’urgence et la relance économique, la pandémie nous a également contraints à réfléchir à la manière dont nous voulons nous reconstruire en sortant de cette crise. L’obligation de se confiner a permis d’améliorer la qualité de l’air dans les grandes villes, où le trafic automobile était pratiquement suspendu. Si l’on ajoute à cela les mises en garde répétées des scientifiques du monde entier, il existe aujourd’hui un quasi-consensus sur la nécessité pour tous les pays de prendre des mesures contre les émissions de gaz à effet de serre.
Cela n’a jamais été aussi vrai que lors de la récente conférence des Nations unies sur le changement climatique (COP26) qui s’est achevée à la mi-novembre à Glasgow. De nombreux dirigeants mondiaux ont profité de la première COP depuis le début de la pandémie pour se prononcer sur des questions importantes telles que l’utilisation du charbon. Lors de son discours d’ouverture, le Premier ministre Trudeau a ambitieusement annoncé que son gouvernement disposerait d’un plan pour plafonner les émissions du secteur pétrolier et gazier afin que ces derniers atteignent la carboneutralité d’ici 2050. Bien que cet engagement figure dans la récente plateforme électorale du Parti libéral, le fait de l’annoncer sur la scène mondiale de la COP, sous le regard du monde entier, a envoyé un message fort, à savoir que le Premier ministre entendait être un chef de file dans ce domaine.
Comme on pouvait s’y attendre, cela a suscité le mécontentement du Premier ministre de l’Alberta, Jason Kenney, qui a souligné l’importance pour le gouvernement fédéral de consulter ses homologues provinciaux avant toute action.
Cependant, il faut souligner que certains des plus grands acteurs mondiaux du secteur pétrolier et gazier, notamment BP et Shell, ont annoncé des plans et l’intention d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050. De plus, les plus grands producteurs de sables bitumineux du Canada ont créé une alliance pour collaborer avec le gouvernement fédéral et le gouvernement de l’Alberta afin de franchir cette étape. Bien que la voie à suivre afin d’atteindre cet objectif crucial ne soit pas entièrement tracée, le gouvernement et les entreprises s’accordent à dire que l’objectif de carboneutralité d’ici 2050 est nécessaire pour le bien de notre environnement et qu’il s’agit d’une voie importante pour l’économie. Un plan et des mécanismes officiels sur la façon d’atteindre cet objectif permettraient également de créer un environnement d’investissement stable pour le secteur énergétique du Canada. Il s’agit d’un travail nécessaire qui nécessite la contribution de toutes les parties concernées : le gouvernement fédéral, les provinces et les entreprises.
Le premier ministre a continué de présenter les réglementations environnementales canadiennes comme une norme à suivre pour les autres pays lors de la COP, en préconisant un prix mondial sur la pollution et en suggérant que les autres pays s’inspirent de la taxe fédérale canadienne sur le carbone. Cependant, lorsqu’on lui a demandé s’il comptait relever les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre du Canada au-delà des 40 à 45 % prévus d’ici 2030, le Premier ministre n’a pas pris d’engagement, affirmant plutôt qu’il fallait d’abord atteindre ces objectifs avant de pouvoir parler d’une augmentation. Cette approche prudente permettra au gouvernement, nous l’espérons, de prendre le temps d’élaborer une gamme complète de mécanismes qui pourront réellement aider le Canada à atteindre ses objectifs de réduction des GES dans les délais prévus, plutôt que de s’engager à atteindre des objectifs plus importants dans le but de marquer des points politiques rapides. De plus, avec la nouvelle Loi canadienne sur la responsabilité en matière de carboneutralité, adoptée dans les dernières heures de la précédente session parlementaire, la pression est forte pour que le gouvernement publie son tout premier plan de réduction des émissions pour l’objectif 2030 dans les mois à venir.
Avec le retour du Parlement, le travail commence également pour ramener au pays les dernières réalisations du Canada à la COP26. Le nouveau ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbeault, et le ministre des Ressources naturelles, Jonathan Wilkinson, qui étaient également présents à la COP, joueront un rôle clé dans un grand nombre d’initiatives annoncées. Pour le Canada et le monde entier, une action décisive et coordonnée est plus que jamais nécessaire dans la lutte contre les changements climatiques.